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Le village
Marie-France Mac Carthy
Par Marcel Mercier.
La Résistance à Valmondois
La Seconde guerre mondiale a révélé au monde incrédule que les tueries, les massacres et les carnages perpétrés depuis la nuit des temps n'avaient pas encore trouvé leurs bornes ultimes. Jamais au cours de l'Histoire on n'avait connu pareils déchaînements de barbarie, de sauvagerie, de cruauté, de férocité, d'inhumanité. Dépassé Néron ! dont Racine écrivait :
"Et ton nom paraîtra, dans les races futures,
Aux plus cruels tyrans une cruelle injure" !
Comme souvent, de telles horreurs suscitèrent en réaction des actes de courage, de générosité, d'héroïsme, d'abnégation, sans toutefois faire oublier la bestialité qui les avait engendrés. Le genre humain médusé a pu mesurer en 1945 l'étendue et la gravité des ignominies commises au cours de la guerre. Maintenant que la bête agonisante se débattait dans sa bauge, on savait. On a pu s'en indigner et châtier les responsables, mais on ignore le nom des femmes et des hommes courageux et modestes qui se sont dressés pour dire "Halte là ! "
En 1944, ils retournèrent sans bruit à leurs occupations comme ils les avaient quittées en 1941/1942 pour prendre les armes. Aussi, beaucoup de ceux qui risquèrent leur vie pour rendre sa dignité au genre humain sont-ils restés dans l'ombre.
Valmondois a souffert aussi de la guerre, des déportations et des fusillades. De son sein surgirent aussi des héros obscurs, à l'insu des Valmondoisiens eux-mêmes. Les générations nouvelles le savent-elles ? S'en soucient-elles ?
Marie-France fut l'une de ces héroïnes inconnues de leurs voisins et quelquefois de leur famille.
Née en 1919, élevée dans un milieu artistique, elle avait montré d'excellentes dispositions pour le chant. La guerre vint infléchir le cours de sa vie. Son courage, sa volonté, son esprit d'initiative – qualités qui n'avaient pas encore trouvé l'occasion de se révéler – s'épanouirent quand elle rejoignit la Résistance.
De 1941 à 1943, elle aida au sauvetage des pilotes alliés (américains et canadiens notamment, mais aussi anglais) dont les appareils avaient été abattus au-dessus de l'Europe occupée. Elle exposa sa vie pour rendre possible leur retour en Angleterre. Il lui arriva de les héberger clandestinement à Valmondois où elle avait sa résidence familiale, ce qui représentait un grand risque pour elle-même et pour ses proches, en attendant qu’un transport fût organisé ou qu’elle pût les accompagner jusqu’à la côte.
Voyager par les transports publics n’était pas sans risques. Un jour qu’elle avait procuré des journaux aux aviateurs qu’elle convoyait dans un train, elle remarqua que l’un de ses protégés tenait son journal à l’envers au moment où un inspecteur allemand se présentait dans le wagon. Mais celui-ci ne vit rien.
Marie-France disposait d'un pied-à-terre à Paris. Alors qu’elle s'y rendait, elle eut la chance d’apercevoir à temps un agent de la Gestapo qui sortait de l’immeuble où elle s’apprêtait à entrer. Elle n’y retourna jamais.
Après 1943, elle travailla avec la Résistance bretonne aux préparatifs du débarquement allié en minant les voies de communication. Plus inattendu, il lui arriva même de faire prisonniers trois soldats allemands.
Après la Libération, elle appartint un certain temps à l'Armée française, aidant notamment à rapatrier des gens que la guerre avait éloignés de chez eux.
En remerciement de sa bravoure, les Etats-Unis d’Amérique lui décernèrent « The Bronze Star » (l’Etoile de Bronze), tandis que la France la décorait de la Croix de guerre et de la Médaille de la Résistance.
Marie-France épousa en 1947 un pédiatre anglais – Dermot Mac Carthy – qu'elle avait rencontré autrefois au cours de vacances passées en famille sur la côte normande. Ils eurent trois fils et une fille. Il était souvent question chez eux d'art et de musique mais aussi de bonne cuisine. Quant aux exploits du temps de la guerre, ils étaient rarement évoqués.
Elle mourut en 2001, âgée de 81 ans.
Marie-France Mac Carthy était le huitième enfant de Charles et Geneviève Geoffroy-Dechaume.